dimanche 8 mars 2015

Vidéo interview | Retranscription partie 1/5

Interview video Adeline Gardinier partie 1/5

Retranscription de la vidéo interview d'Adeline Gardinier, psychologue clinicienne et psychothérapeute, auteur du livre "Aider le patient à sortir de la crise : une méthode psychothérapeutique" publié aux éditions De Boeck.


Bonjour Adeline
Bonjour Olivier, ce jour ne peut être que bon puisqu’il est l’occasion de transmettre, au travers de cette vidéo, des vérités thérapeutiques peu considérées, mais essentielles au bien-être de tous !

L’objet de cette interview est donc de transmettre au plus grand nombre vos observations et vos découvertes sur les processus psychiques conduisant à une dynamique harmonieuse ! Pouvez-vous nous présenter brièvement votre parcours professionnel vous ayant mené à découvrir toutes ces clés thérapeutiques.
Oui, bien sûr, mon cursus étudiant est des plus communs. J’ai fait des études en psychologie clinique afin de répondre à un désir profond de mieux comprendre la souffrance humaine dans toutes ses formes, mieux la cerner pour aider à son dénouement.

Le diplôme en main, j’ai pu alors aménager le cadre expérientiel où j’allais rencontrer, dans leur intimité psychique, des personnes en proie à divers conflits internes. Elles m’ont systématiquement révélé le sens du symptôme et surtout sa valeur constructrice pour avancer ! Je n’ai donc pas dégagé ces outils d’aide de concepts théoriques même si ceux-ci m’ont beaucoup inspirée. J’ai simplement écouté l’histoire transgénérationnelle et relationnelle de nombreux hommes. Le recueil précieux de leur récit de vie, sur 15 ans, a permis de dégager des règles psychiques donnant la clé du rébus et du dénouement du symptôme !

Votre intérêt pour l’approche conceptuelle systémique, il y a quelques années, a-t-elle facilité la création de ce regard structurant sur les pathologies même les plus lourdes ?
Tout à fait, la rencontre avec cette vision contextuelle exhaustive, positive et dégagée de critiques inutiles sur la maladie m’a tout de suite fortement parlé en tant que thérapeute. Il s’agit de se centrer sur les apports et non sur les déficits du symptôme.

Lors de nos réunions de soignants, l’attitude trop fréquente à s’attarder sur ce que révèle la pathologie des manques du souffrant constitue une perte de temps et une aberration ! Comment travailler sur des déficits ? C’est impossible et stérile. Par contre, s’interroger sur l’utilité et la signification du symptôme conduit systématiquement à une thérapeutique opérante.

Dans le milieu médical, il est une réalité inquiétante, car habituelle : le soignant réfléchit, généralement, la douleur et la commente dans sa dimension bruyante et désorganisée. Il est alors démotivé puisqu’il ne peut pas s’appuyer sur des diagnostics et des descriptifs déficitaires pour accompagner de manière pertinente le malade. Ainsi, la systémique aide à développer cette logique de pensée constructrice, ouvrant le champ des possibles.

Pouvez-vous nous donner un exemple concret de cette manière pertinente d’appréhender la maladie pour s’en libérer ?
J’aurai plusieurs exemples à vous proposer. De façon assez raccourcie, je vous dirai que le symptôme est abordé dans son utilité individuelle et relationnelle. Ainsi, les consultants rencontrés cessent d’être bloqués dans leur cheminement lorsque l’un découvre que sa lourde sciatique est une protection narcissique pour ralentir un rythme de vie dangereux, lorsque l’autre réalise que son apparente folie est une façon de sacrifier sa vie psychique pour protéger les valeurs mythiques rigides de son groupe d’appartenance. Des parents sortent de leur paralysie lorsqu’ils abordent les otites à répétition de leurs fils comme un moyen de les faire cesser de se disputer.

Bref, le symptôme est décodé dans sa fonction protectrice pour le souffrant lui-même et pour son entourage. Il perd alors sa dimension péjorative pour révéler tout son sens bienveillant. Cette connotation valorisante du symptôme a des résonances signifiantes sur la nouvelle dynamique du souffrant. Il découvre que ses conduites symptomatiques sont généreuses, utiles et cohérentes là où il pensait jusqu’alors être égocentrique, insensé et impuissant !

C’est là où nous retrouvons la composante paradoxale et surprenante des récits thérapeutiques tenus aux patients ? C’est certainement ce point qui en fait une force de changement ?
Oui, je me surprends, durant les entretiens, à m’écouter parler et à réaliser que mon discours hors du commun est tellement plein de bon sens ! Non pas que je sois gonflée d’un narcissisme hypertrophié, mais parce que je pense simplement que l’impression paradoxale, se dégageant de cette narration thérapeutique, découle d’une méconnaissance importante de l’homme sur ses déterminants systémiques !

Lorsqu’on garde, en effet, en permanence à l’esprit le fait que l’homme est inclus dans divers groupes d’appartenance, il est plus facile de réfléchir son symptôme comme un moyen de réguler des changements non acceptés et non intégrés par ces mêmes groupes d’appartenance.

Dans les systèmes souples, les ajustements aux stimuli nouveaux se font sans problème. Il n’y a donc pas besoin d’avoir recours au symptôme pour maintenir, à tout prix, l’équilibre et l’unité identitaire d’antan. La pathologie se retrouve exclusivement dans les systèmes rigides, là où des traumatismes collectifs plus ou moins lointains empêchent toute adaptation nécessaire. Le manque de sécurité et l’absence d’élaboration des chocs passés entrainent une paralysie d’ajustement au sein du système. C’est un vrai problème, car la vie n’est que mouvement et donc engendre des rééquilibrages permanents.

Un système fragilisé redoute le changement et craint d’être annihilé par lui. Le symptôme d’un membre apparait alors pour éviter toute transformation signifiante de l’organisation de son groupe perçue, de manière erronée, comme une menace pour la cohésion du groupe.

La suite la semaine prochaine...
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