samedi 23 mai 2015

La guérison est dans le symptôme 2/3 Retranscription vidéo entretien



Cet article correspond à la deuxième partie de la retranscription texte de la vidéo "La guérison est dans le symptôme" publiée le 1er mai 2015.



Des maladies lourdes pour défaire de fortes rigidités 

Des maux encore plus lourds peuvent surgir lorsque la résistance au changement est telle qu’elle nécessite la création d’un symptôme transformateur hyper signifiant.

Ainsi, il n’est pas rare de voir apparaître des cancers, des dépressions lourdes, des épisodes démentiels là où le sujet est dans une très grande difficulté à préserver son espace personnel. L’intensité du handicap est proportionnelle à l’intensité du frein à mettre pour que le patient écoute ses propres besoins et limites. La teneur du symptôme est certes liée à la sensibilité organique mais également à l’ampleur des résistances internes.

Pour exemple, un consultant très ambitieux souffrait de dépressions chroniques depuis longtemps. Il faisait des séjours réguliers en milieu hospitalier. L’homme présentait la fâcheuse habitude d’utiliser le cadre de soins afin de récupérer d’une fatigue professionnelle signifiante. Il prenait ses psychotropes, se reposait quelques temps contraint par ses troubles dépressifs puis reprenait le travail. Il se réengouffrait alors dans les mêmes codes dysfonctionnels d’autrefois.

La dépression était alors le  symptôme dénonçant une loyauté dangereuse à des valeurs éducatives trop rigides. L’homme reprenait un fonctionnement transmis et caractérisé par l’exigence et la rigueur. Le symptôme s’inscrivit alors comme la solution temporaire au problème d’hyper contrôle.

Toutefois, il se chargea de plus en plus en tension interne au fil des années. En effet, le souffrant ne prenait pas en compte définitivement les codes adaptés que le trouble cherchait à établir. Le souffrant assouplissait certes son fonctionnement mais de manière passagère. Il se réorganisait autour de ses anciennes dynamiques malheureuses dès qu’il avait suffisamment récupéré.

Ainsi, sous le regard stupéfait de son médecin, l’homme décompensa dans un épisode démentiel lors de la énième hospitalisation. Le traitement ne faisait plus effet. Logique, le symptôme s’était aggravé afin de parer aux résistances chroniques du souffrant. Il devait être plus handicapant afin de garantir l’établissement définitif des règles structurantes qu’il cherchait à pointer. La folie obligeait le sujet à davantage lâcher-prise et sur un temps suffisamment long afin d’assurer un ancrage solide des nouveaux repères organisationnels.

Cet exemple met en relief la pertinence du trouble dans sa nature mais aussi dans son intensité.  Le symptôme présente les particularités nécessaires à l’aménagement du bon cadre fonctionnel. Il se charge aussi de l’intensité suffisante au respect de ses contraintes. C’est pourquoi, dans les problématiques très rigides, son intervention peut être dangereuse. Le symptôme est obligé de présenter des contraintes lourdes afin de faire céder l’opposition signifiante de transformation.

Du bruit rassurant dans la psychose

Ainsi, la personne psychotique présente des troubles de comportement très bruyants lorsqu’elle avance dans sa problématique. Ce symptôme crée en effet un « cadre optimal d’expression personnelle »  là où le sujet souffre d’inhibition excessive. Le patient indifférencié sacrifice sa subjectivité aux croyances dysfonctionnelles de ses groupes d’appartenance. Une affirmation débordante se présente alors comme le trouble nécessaire à la mise en place d’un lieu de désaliénation.

Ce processus psychique est très important à transmettre aux soignants afin de ne pas décourager des mouvements symptomatiques salvateurs. S’il est important de contenir une crise, il ne faut pas court-circuiter ou donner une connotation régressive à des troubles nécessaires dans une dynamique d’avancement. Dans cette logique de raisonnement, on comprend comment la stabilisation chimique de patients psychotiques peut paraitre inquiétante. Certes, le sujet est calme mais il est maintenu, au travers de cette camisole artificielle, dans cette désubjectivation, cause de son mal premier.

La connaissance du « sens fonctionnel, utile du symptôme » est donc importante afin de ne pas commettre des impairs thérapeutiques lourds de conséquence. Malheureusement, dans ma pratique, je constate trop les effets désastreux de cette ignorance. L’expression de troubles, inhérents à la possibilité d’évolution, sont ainsi critiqués et entravés. Le soignant alors, sans en être conscient, étouffe les bienfaits du symptôme.

Pour terminer, je vais vous énumérer brièvement une succession d’exemples parlants afin de mettre en relief la dimension universelle de ce processus symptomatique.

Suite et fin de la restranscription la semaine prochaine (3/3)...