dimanche 14 août 2016

Des voix intérieures et duelles ( Partie 2)

Un dialogue chaleureux entre le Soi et l’Ego pour retrouver l’Unité harmonieuse


Dans cet article, je souhaiterais m’attarder sur un matériel particulier. Il s’agit de ces petites « voix égotiques » troublant les perceptions du sujet névrotique ou schizophrénique. Elles envahissent les pensées du souffrant sous forme de ruminations ou d’hallucinations. Leur manifestation symptomatique permet de mettre en relief les raisonnements limitants et faussés du sujet.

L’inconscient dénonce, dans un contenu idéïque obsédant, la source du problème. La pensée envahissante livre les directives d’une psyché excessive essayant de se libérer d’un Ego opprimant. Elle offre sur un plateau la matrice de conditionnements illusoires dans laquelle s’est laissé enfermer le consultant.

Afin d’aider le sujet à repérer et à maîtriser cet Ego apeuré, j’ai développé au fil de ma pratique un exercice allégorique simple. Le sujet doit entamer un dialogue interne entre cette partie égotique paralysante et une partie plus « inspirée » de son être.

Il est question de personnaliser ce Mental aliénant sous la forme d’un « petit enfant apeuré ». Même si je le nomme « le petit diablotin », l’objectif est de le présenter, avec beaucoup de bienveillance, comme celui qui est « mauvais conseiller » en raison  de traumas non digérés.

Le souffrant doit donc répondre consciemment à ce « personnage perturbateur » de manière modérée et tolérante. Il est invité à s’identifier à un pédagogue respectueux des phobies de son élève. Bien sûr, quelques fois les ruminations névrotiques ou les voix psychotiques peuvent être très virulentes ou effrayantes. Toutefois, le contenu agressif est rapidement élaboré dans ce qu’il dénonce de peurs inconscientes.

L’accueil compréhensif de ce discours symptomatique négatif est important. L’instructeur ne doit pas rejeter ou juger « l’initié » fébrile. Il doit au contraire le rassurer et le conduire sur des chemins d’avancement rassurant. De plus, le symptôme est un allié. Il focalise sur le nœud du problème. Il indique l’endroit à travailler. Il doit donc être considéré avec beaucoup de gratitude et de délicatesse.
Rejeter les voix internes négatives ne peut donc que les alimenter. Comprendre leur intention positive sous-jacente et leur besoin de démantèlement progressif est la clé de l’avancement. D'ailleurs, ne dit-on pas qu’il faut se laisser traverser et non pas lutter contre ses peurs ?

Le consultant doit donc apprendre à écouter ses dissociations, ses hallucinations et ses ruminations avec beaucoup de sagesse. Leur contenu est précieux car il révèle l’histoire chaotique d’où le Mental a tiré tant de forces d’expression. L’Ego apeuré raconte ainsi les insécurités auxquelles le sujet a dû faire face autrefois. Il tente de préserver l’individu exagérément en l’obligeant à se conformer à d’anciennes règles désadaptées de ses systèmes. L’Ego apeuré répond à un rôle collectif enfermant loin d’une authenticité d’être. Lorsque les propos délirants ou parasitants submergent les pensées du sujet, ils apparaissent comme une explosion narcissique d’un sujet piégé dans un rôle Moïque.

Il s’agit donc, dans un premier temps, de décoder la valence protectrice des pensées égotiques. Il faut ensuite  ôter à celles-ci leur intensité d’action en relativisant le danger vécu. La peur et le doute, en effet, réveillent des défenses individuelles fragilisantes. L’Ego apeuré s’exprime alors dans toute son ampleur pour isoler un sujet aux prises avec des souvenirs relationnels traumatiques. L’Ego traumatisé aborde alors certaines thématiques sensibles du passé et « crée » une coupure entre l’homme et sa connexion divine. Il le replace dans des situations in sécurisantes afin de lui renvoyer une image de lui-même peu valorisante. Le sujet est alors coupé de ses réelles capacités et de son essence supérieure.
L’Ego apeuré est ce personnage illusoire que le sujet croit être. Il se pense séparé, mortel, faillible et dans l’obligation de se protéger d’un monde pseudo-dualisé. Plus le sujet s’éloigne de la connaissance de sa nature parfaite, plus l’Ego apeuré redouble douloureusement ses consignes erronées ! En effet la souffrance, découlant de l’inauthenticité d’être, entretient la peur, elle-même, génératrice d’un discours egotique déstructurant.

Le Mental dysfonctionnel se perd dans la dualité du bien et du mal et il entretient, de ce fait, le sujet dans des  fausses croyances. Il lui demande de se protéger de douleurs qui n’existent pas. Les voix internes sont le fruit d’un mirage non décodé comme tel. Le sujet n’est pas celui que ses systèmes d’appartenance a formaté dans un rôle, une identité et des conditionnements bien précis. Il s’est confondu avec ces présentations diverses de lui-même construites sur de multiples expériences de vie. L’Ego apeuré renvoie constamment au souffrant une image de lui-même où il serait un être limité et fragilisé par des traumas vécus. Il l’enferme dans un personnage dramatique. L’Ego traumatisé est l’intrus pointant, par sa présence, l’ignorance de l’homme sur sa condition divine.

L’appréhension du symptôme dans sa non-dualité permet un travail de dédramatisation. Elle désengage des peurs et des résonances de traumas en donnant accès à la vérité du Tout, de l’harmonie, de l’immortalité et de l’Amour.

L’Ego apeuré protège excessivement un être qui se croit limité. La découverte de l’essence supérieure de l’homme, au travers de ses troubles, permet à celui-ci de se détacher d’un « avoir » pour « être » tout simplement. Il n’a plus besoin de contrôler un extérieur dont il se sent dépendant et qui lui fait peur. Il découvre que le bonheur et la paix sont internes.

Dans un dialogue chaleureux, le sujet est invité à parler à son Ego. Lorsque celui-ci l’importune, sous la forme d’hallucinations ou de ruminations, le Soi authentique doit accueillir favorablement le message tout en osant questionner sa validité. Il est important d’être en empathie avec les peurs, la colère et toute autre émotion perturbante traversant le discours interne. Cette intrusion de pensées est, dans son intention, bienveillante. Elle souhaite alerter sur des dangers qu’elle pense réelle. Lorsque la voix apparaît moraliste, agressive, hautaine, insensible, elle s’efforce de persuader son interlocuteur d’emprunter des repères qui lui semblent adaptés à la situation. Or, la situation est mal évaluée car elle est abordée sous l’angle de la dualité.

L’Ego traumatisé oblige le sujet à porter attention à de fausses fragilités que la perception dualiste a fait naître. Il induit un mouvement de surprotection réactionnel à un trauma « imaginaire ». En effet, dans un monde non-dualiste, la blessure éprouvante disparaît car le mal n’existe plus. Le sujet comprend que « tout dysfonctionnement » de l’autre et de lui-même proviennent de l’oubli de l’heureuse réalité : la perfection des êtres. Ainsi, lorsque l’individu agresse, c’est qu’il a porté en amont un stress et un mythe groupal lourd. Sa loyauté excessive le conduit à la destruction. Son grand amour le conduit à la haine. La boucle est bouclée pour mettre encore en relief la fausse dualité !

La douleur et les traumatismes sont donc la résultante de l’ignorance de l’homme sur sa belle nature. En séance, il n’est pas besoin de recourir à l’emdr pour aider le consultant à sortir de ses peurs incontrôlées. Lorsque la victime analyse de manière élaborée l’histoire douloureuse et sacrificielle de son agresseur, lorsque le souffrant découvre le don généreux exprimé au travers de ses symptômes, il ne peut plus nier le cœur aimant de toute souffrance. Si chacun avait accès à son essence divine, il n’y aurait plus de peurs et de pulsions destructrices sur cette terre. Comment se maintenir dans le mal-être lorsque l’illusion du mal et du limité s’effacent ? Comment trembler lorsque les clés du bien-être apparaissent désormais dans un univers perçu dans sa multi-dimension et sa complétude ?

L’Ego est ce personnage/corps avec lequel le Soi pédagogue doit échanger afin de mettre en lumière cette heureuse et parfaite réalité.

Ainsi, une jeune femme, identifiée à un rôle antérieur de femme trompée, devra raisonner la petite voix égotique lorsque celle-ci lui commandera  de se méfier fortement de son nouvel ami.
Un homme, resté ancré dans sa place d’enfant violenté, devra redoubler d’efforts pour maîtriser ses voix internes lorsque celles-ci lui diront que sa femme est toxique.

L’Ego apeuré est cette partie de l’être qui se croit faible. Il est fortement affecté par les rôles dans lesquels il s’est laissé enfermer durant son existence. La famille, la société, l’individu lui-même ont établi certains codes identitaires sur lesquels l’Ego s’étaye. Cependant, ces témoins existentiels ont oublié qu’ils ne s’agissaient que de fonctions interchangeables. L’homme est interconnecté à l’ensemble des éléments du cosmos. En cela, il est Tout et non pas une partie séparée. Il est omnipotent. Cette vérité doit être démontrée à « l’enfant intérieur affolé » s’exprimant chez chaque consultant. Cet Ego alors sera capable de s’apaiser au fil de cet enseignement non-dualiste. Il pourra alors laisser le Soi authentique du sujet exprimer toute sa liberté, sa sérénité et son amour. Il se retirera, bienheureux de céder sa place, à un univers baignant dans l’unité, l'éternel et la joie du Tout !

La suite (troisième partie) la semaine prochaine...